Les scarifications sont traditionnellement utilisées comme un titre de citoyenneté dans plusieurs sociétés africaines. Dans de nombreuses cultures africaines, des scarifications sont historiquement ou traditionnellement tracées sur le visage d’individus pour marquer leur appartenance ethnique, sociale ou religieuse.
C’est le cas, plus récemment, chez plusieurs sous-groupes ethniques dans la sous-région et en Afrique général. Leur utilisation est peut-être attestée sur les sculptures en terre cuite et en bronze de la civilisation du début du second millénaire de notre ère.
Il y a plusieurs années en Afrique, des peuples, pour identifier un des leurs, lui mutilent le visage ou certaines parties de son corps. C’était un symbole de personnalité ou d’appartenance à une tribu. Ainsi, il était plus facile de reconnaître les gens d’une certaine famille à partir des scarifications dans son visage ou des gens d’une certaine région à partir de ces marques sur sa peau. Mais de nos jours, la pratique est très controversée et considérée même comme barbare par certaines personnes.
Le débat a été vif sur les réseaux sociaux en ce début qui frustre beaucoup des gens. L’image qui a choqué est celle d’un petit garçon qui venait de subir une cérémonie de scarification. Il était tout en pleurs, le visage ensanglanté. Sous le choc, les réactions ont été violentes. Pour nombres, c’est faire du mal à un enfant sous des raisons archaïques. « Il faut faire les scarifications certes mais pas à un enfant. Il faut le laisser grandir et choisir de le faire ou pas. Sinon, le faire à un enfant, c’est lui imposer un choix, une marque toute sa vie. Et ça peut lui porter des préjudices dans le futur » dit un internaute.
Dans leurs confidences à notre rédaction, l’un d’eux, un Burkinabé explique : « en période de guerre, les tribus Mossis et Ko se reconnaissaient, et ainsi évitaient de s’entre-tuer. Pas besoin de carte d’identité, je porte déjà mon identité sur mon visage ».
Comme pour confirmer, le grand prêtre , dans notre entretien sur les scarifications rapporte ceci : « dans leur livre « Awon asa ati Orisha ile Yoruba », les nigérians Olu Daramola et Adebayo Jeje affirment que les ancêtres se sont adonnés aux scarifications afin de permettre à leurs descendants qui pourront malheureusement être pris en esclavage, de se reconnaître entre eux et de se souvenir de leurs origines lorsqu’ils se retrouveront loin de leurs terres. De récentes explications ont révélé du côté du Bénin que certaines familles scarifiaient leurs descendances dans le but ultime de leur éviter l’esclavage puisque les esclavagistes préféraient les corps non mutilés ». Un autre noua avait dit aussi que selon la tradition Moose, les scarifications seraient apparues au Nord du Ghana actuel. « Au XVIIIe siècle, au Bénin, les marques sur le visage permettaient d’identifier les membres de son clan, au cours de guerres et de conflits. Ces marques furent également une manière de contourner l’esclavage, à partir du XVIe siècle. Les négriers se détournaient des personnes portant des marques sur le visage et sur le corps ».
Les scarifications traditionnelles sont profondément enracinées dans de nombreuses sociétés africaines en tant que moyen de marquer l’appartenance ethnique, sociale ou religieuse des individus. Ces marques distinctives tracées sur le visage ou d’autres parties du corps revêtent une signification profonde au sein des communautés qui les pratiquent.
D’une importance significative, les scarifications servent souvent de titre de citoyenneté dans plusieurs cultures africaines. Elles témoignent de l’identité et de la place d’un individu au sein de sa tribu ou de son groupe social. En arborant ces marques, une personne affirme son appartenance à une communauté spécifique, héritant ainsi de son histoire, de ses traditions et de ses valeurs.
Au-delà de leur aspect esthétique, les scarifications sont porteuses de symboles culturels profonds. Elles peuvent refléter le rang social d’une personne, son âge, son statut matrimonial ou même sa lignée familiale. Ces marques corporelles sont un langage visuel complexe qui communique des informations cruciales au sein de la société, renforçant ainsi le tissu social et la cohésion communautaire.
Les bons côtés d’une riche tradition
Comme toute pratique, la scarification a des vertus. Alors qu’il existe plusieurs types de scarification, on apprend que la scarification médicale a pour but de traiter des maladies de peau ou pour traiter des zones se trouvant à proximité intérieure de l’épiderme. La scarification est aussi utilisée dans certains cas de vaccination ou pour traiter des cas virulents de rosacée. Les uns rapportent les propos du docteur Bouba Amman, historien à l’Université de Ngaoundéré (Cameroun). Interviewé sur le phénomène, l’historien explique « ces modifications sont faites à des fins esthétiques, parce qu’elles sont l’expression de la beauté. Une façon de transformer la nature en culture. C’est une richesse de ces peuples : « l’homme n’est pas que nature, il est aussi culture dans la mesure où il se sent la capacité de faire de son corps et de son environnement ce qu’il veut. »
Il va plus loin pour témoigner que « les modifications corporelles ont aussi une fonction thérapeutique. Les incisions faites au niveau des articulations ont pour fonction de lutter contre les rhumatismes, les mauvais esprits et les sorciers. Pour prévenir les conjonctivites, les scarifications sont faites sous les yeux des enfants, surtout pendant la période de propagation de cette maladie ». Pour d’autres, le caractère définitif des tatouages et des scarifications conditionne leur usage qui se distingue radicalement de celui de la peinture corporelle. Les scarifications ont un rôle dans la détermination de la classe de celui qui les arbore. Mais ces bons côtés sont balayés du revers de la main par la modernité.
Une pratique qui s’éteint
Mais osons l’avouer, cette pratique fait face au dictât de la modernisation. Elle disparaît presque. Dans certaines régions du Bénin, les parents refusent de plus en plus de faire subir à leurs enfants cette mutilation. Un père originaire du centre du Bénin nous explique que pour ses enfants, il a refusé. « J’ai comme on le dit chez nous, acheté pour mes enfants. J’ai fait une petite cérémonie pour leur épargner ça. Je ne veux pas qu’ils subissent des moqueries de la part de leurs camarades quand ils seront en société ».
Mme K. Djeneba, gérante d’une boutique au Burkina Faso, vit ses cicatrices comme un poids aujourd’hui. « Les gens trouvent ça beau, moi je trouve ça laid. Nous ne sommes pas comme les autres. Auparavant j’aimais mes cicatrices et je m’en vantais. Mais aujourd’hui, en ville, c’est passé de mode » dit-elle. Dans leurs confidences à Joana Choumali, certains porteurs de scarifications confient « aujourd’hui, si je pouvais les effacer, je le ferais ».
L’histoire des scarifications en Afrique remonte à des siècles, et bien que certaines pratiques aient pu évoluer au fil du temps, elles demeurent une expression tangible de l’identité culturelle et de la fierté communautaire. En tant que titre de citoyenneté, les scarifications traditionnelles continuent de jouer un rôle essentiel dans la préservation des traditions ancestrales, tout en affirmant l’unicité et la diversité des peuples africains.
Ainsi, les scarifications traditionnelles ne sont pas simplement des marques sur la peau, mais des symboles vivants d’une identité culturelle profonde et d’une histoire partagée. Leur importance en tant que titre de citoyenneté dans plusieurs sociétés africaines réside dans leur capacité à relier les individus à leur héritage culturel et à renforcer le sentiment d’appartenance à une communauté plus vaste.
La tradition en Afrique a de beaux jours devant elle, mais est-ce le cas des scarifications ? On ne peut oser répondre par l’affirmative.