Quand la culture devient flambeau de l’identité collective: Dans un monde globalisé où les repères se brouillent, les identités s’effritent et les valeurs se perdent, la culture demeure la pierre angulaire de la mémoire collective. Elle est bien plus qu’un simple héritage artistique ou traditionnel ; elle est l’âme d’un peuple, le fil conducteur entre le passé, le présent et l’avenir.
Pour les sociétés africaines, cette réalité est d’autant plus cruciale que les chocs de l’Histoire – colonisation, traite négrière, mondialisation, modernité mal assumée – ont ébranlé les fondements même de leur essence. Alors que beaucoup cherchent dans le mimétisme occidental une voie de progrès, il devient urgent de réaffirmer cette vérité simple mais puissante : la culture nous raconte d’où nous venons et nous guide vers où nous devons aller.
Une mémoire vivante, gardienne de notre passé
La culture est la mémoire des peuples. Elle transmet les récits fondateurs, les mythes, les rites, les langues, les chants, les savoirs, les gestes, les valeurs qui façonnent la conscience collective. En Afrique, cette mémoire est essentiellement orale et communautaire, portée par les anciens, les griots, les prêtres traditionnels, les sages, les artisans…
À travers les proverbes éwé, les danses ashanti, les cérémonies vodou, les récits mandingues ou les masques dogons, c’est toute une cosmogonie qui s’exprime. Cette richesse culturelle n’est pas un vestige du passé. Elle est un code génétique collectif, une manière d’être au monde, de penser le réel, de vivre ensemble.
« Un peuple qui ne connaît pas son passé est condamné à le revivre », disait l’historien George Santayana. En Afrique, la rupture avec la mémoire culturelle, souvent encouragée par les politiques d’acculturation coloniale ou de modernisation aveugle, a entraîné une perte de repères existentiels.
Une boussole pour comprendre le présent
Dans un contexte de mutations sociales, de crises identitaires, de conflits et d’injustices, la culture agit comme un miroir critique. Elle interroge, éclaire, et parfois dénonce. Elle aide à décrypter les comportements sociaux, les choix politiques, les dynamiques économiques, car elle inscrit les réalités actuelles dans un héritage de sens.
Aujourd’hui, le développement durable, la démocratie participative, l’éducation, la paix sociale ne peuvent réussir sans intégrer les référents culturels locaux. Comment parler de justice dans un village sans évoquer l’arbre à palabres ? Comment parler d’égalité sans rappeler les rôles complémentaires dans les sociétés matrilinéaires ou patriarcales ? Comment bâtir l’avenir si l’on nie le socle culturel qui soutient nos identités ?
La culture n’est pas un obstacle à la modernité, elle est sa condition d’adaptation réussie.
Un levier d’avenir : vers un développement enraciné
Si la culture nous raconte notre passé, elle nous dit aussi où nous devons aller. Elle trace une voie d’harmonie entre les traditions et les aspirations contemporaines.
En matière d’éducation
Valoriser les langues locales, les contes, les arts et les valeurs endogènes à l’école permet d’ancrer la jeunesse dans son identité. Un élève qui apprend en wolof, en mina ou en mooré n’est pas coupé de la science, bien au contraire. Il comprend mieux, il pense avec ses racines.
En matière de gouvernance
La sagesse ancestrale africaine regorge de principes de collégialité, de consensus, de justice communautaire. Redécouvrir ces modèles peut inspirer des formes de démocratie locale plus adaptées aux réalités du terrain.
En matière d’économie et d’entrepreneuriat
Le savoir-faire traditionnel dans l’agriculture, la médecine, l’artisanat ou la gestion des ressources naturelles peut nourrir un modèle économique durable, centré sur la valorisation locale et l’autonomie.
En matière de cohésion sociale
La culture favorise le vivre-ensemble. Elle rassemble par la musique, le sport, la fête, les symboles. Elle crée un sentiment d’appartenance qui est le fondement de toute nation forte.
Défis et espoirs pour une culture africaine forte et vivante
Défi de la transmission
La modernité numérique, la mondialisation, l’urbanisation mettent à mal la chaîne de transmission intergénérationnelle. Les jeunes se désintéressent souvent de leur culture, faute de valorisation par les systèmes éducatifs, les médias ou la famille.
Il est temps de faire de la culture un pilier des politiques publiques.
Défi de la préservation
De nombreuses traditions disparaissent, des langues meurent, des rituels se perdent. Il faut documenter, archiver, numériser et surtout réactiver ces éléments comme des ressources vivantes.
Défi de la réinvention
La culture n’est pas figée. Elle doit aussi se réinventer, se nourrir des apports du monde, mais sans se renier. Une jeunesse africaine créative, connectée, engagée, peut faire de la culture un espace d’innovation, de résistance et de rayonnement.
Se connaître pour mieux avancer
La culture n’est pas un luxe. Elle est une nécessité existentielle. Elle nous dit qui nous sommes, elle nous donne la force de résister, elle nous inspire pour construire l’avenir. Sans elle, le développement est vide, la politique est instable, et la société est désorientée.
Redonner à la culture africaine sa place centrale, c’est redonner à l’Afrique sa dignité, sa voix et son destin.
Dimitri AGBOZOH-GUIDIH
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