6 septembre 2019, Robert MUGABE est mort ! Quels sont les sentiments qui doivent habiter le cœur des habitants du Zimbabwe et de l’Afrique en général ?
Doit-on rendre hommage à l’homme qui a combattu le régime raciste de Ian SMITH qui sévissait en Rhodésie, l’homme qui après sa victoire a tendu la main aux Blancs pour la construction commune du pays ?
Doit-on regretter cet homme qui a permis à son pays d’être parmi les plus et les mieux scolarisés en Afrique pendant les dix premières années de
sa présidence, avec des centres de santé moderne, des logements pour les Noirs, les déshérités du régime raciste d’auparavant? Ou doit-on faire mémoire avec horreur des 20 000 personnes massacrées dans le Matabeleland, fief de son ex-compagnon de lutte Joshua NKOMO, de la sévère répression contre les opposants, de la manière dont il s’est
accroché au pouvoir, se servant même de sa femme pour cela, à tel point qu’on a dû passe par un coup d’état pour le faire partir ?
La question s’est posée aussi à propos de Kwame N’KRUMAH, héros du Panafricanisme, dont les dérives mégalomaniaques et les tentations totalitaires finirent par provoquer le coup d’Etat qui le fit quitter la présidence du Ghana en 1966. Et, aujourd’hui, que dire du double
exemple de la Guinée : Alpha CONDE, ancien président de la FEANF (Fédération des Etudiants d’Afrique Noire en France) qui lutta des années justement contre les excès du héros de l’indépendance guinéenne, Sekou TOURE devenu un tyran tortionnaire? Ceux qui ont connu Alpha CONDE dans les années 70, pourraient lui ressortir ses discours plutôt
maoïstes en faveur des masses opprimées et ses déclarations enflammées contre l’impérialisme. Que fait-il des masses populaires aujourd’hui et ses compromissions avec BOLLORE ne le mettent-ils pas du côté des impérialistes ?
Mais il y a aussi, nos anti-héros, moins célèbres, les hommes politiques qui migrent de l’opposition à la mouvance présidentielle l’espace d’une élection, laissant leurs militants sur le carreau, les étudiants qui deviennent les piliers les plus solides du système qu’ils ont combattu quelques mois seulement avant !
Pourquoi ? On pourrait évoquer comme explication immédiate, les caractéristiques
personnelles de certains individus. En effet, beaucoup se jettent dans le combat politique ou syndical à cause de l’appât du gain et de l’amour du pouvoir. Les idéaux de la lutte ne tiennent pas le coup devant une opportunité pour arrondir le compte en banque ou devenir
un « chef ‘’. Ces éléments personnels peuvent se trouver exacerbés par un environnement national caractérisé par le comportement des « inconditionnels », fidèles à une personne sans discernement, incapables de recul et donc de critique. En effet, le culte de la personnalité ne vient pas d’abord des tyrans mais de leur entourage qui les encense sans retenue… Et
dans une Afrique, où les structures sociales traditionnelles ont encore un impact, les loyautés sociohistoriques poussent souvent à soutenir un frère quel que soit son comportement. Enfin, il y a la petite phrase hypocrite de ceux qui profitent du système et qui aimeraient le voir perdurer pour cela : « On ne change pas une équipe qui gagne !».
Un environnement international favorable, peut également transformer progressivement un héros en anti-héros. C’est ce qu’on est en train de faire avec KAGAME. En effet, lorsqu’en 1994, plus de 600 000 Tutsi se faisaient tuer, la communauté internationale n’a pas su donner une juste réponse : on a eu des cas de déni, une lenteur à réagir qui a permis au génocide d’aller jusqu’au bout… Et qu’a été la réponse des Africains qui, le 7 avril 2019, sont allés commémorer avec KAGAME le 25ème anniversaire du génocide et la fin de l’horreur qu’il a réussi à arrêter? Et surtout, les Africains se sont-ils vraiment assis pour réfléchir aux moyens pour que cela ne se reproduise plus ? Au contraire partageant peu ou prou avec les
Occidentaux un certain sentiment de gêne et de culpabilité, ils se sentent obligés d’offrir à KAGAME un soutien sans faille, au nom de performances économiques, qui ne sauraient pourtant cacher les nouvelles attitudes antidémocratiques du chef de l’Etat rwandais. Encore
dix ans et on en aura fait un de ces anti-héros dont l’Afrique a le secret, et lui-même ivre de pouvoir jamais remis en cause, acceptera-t-il de quitter facilement le fauteuil présidentiel au moment où la constitution le lui demandera ?
Mais revenons à nos hommes politiques « ordinaires », plus particulièrement, ceux qui se disent de l’opposition. Lorsqu’on analyse leur combat, lorsqu’on essaie d’en trouver la racine, on se rend compte que nombre d’entre eux luttent en général contre un système, une personne, souvent pour une personne, mais pour quoi donnent-ils de leurs ressources
en temps et en énergie, pour quel idéal ? Se sont-ils même jamais posé la question de cet idéal ?
Cette dernière question peut sembler quelque peu insultante pour ces personnes, mais notre intention n’est pas celle-là. En effet, si on peut changer facilement de camp on ne change pas aussi aisément d’idéal, et si celui-ci est explicite pour son porteur alors les oppositions d’idéaux devraient fonder une sorte de permanence dans les choix fondamentaux.
Par contre, lorsqu’on se bat seulement contre quelqu’un, à un moment donné on peut avoir des intérêts communs avec cette personne et on n’a plus de raison de se battre contre elle, on fait alors alliance avec elle. Ou alors, si on se bat seulement pour quelqu’un, des intérêts divergents peuvent se présenter et séparer ces deux personnes, alors intervient une rupture qui peut paraitre brutale ou injustifiée aux yeux des autres, mais qui dans le fond est normale. Et enfin lorsqu’on se bat seulement pour prendre le pouvoir, toute alliance ou toute rupture servant cet objectif peut se concevoir. Alors lutte-on vraiment contre un système ou bien juste pour prendre une place pour faire presque les mêmes choses ?
Voilà pourquoi lorsque se profilent des échéances électorales, il est important que ceux qui ont à choisir, c’est-à-dire les citoyens électeurs, connaissent non seulement les personnes qui briguent leurs suffrages, mais leurs projets, leurs idéaux, les valeurs sur lesquelles sont fondées leur vie. Pour cela ils ne pourraient se contenter de les écouter quand elles décident
de parler, parce que là, ces personnes font ce qui est normal pour un candidat : elles essaient de plaire, elles se vendent, comme on le fait à un entretien d’embauche.
Surtout au Togo, où il y a quinze jours de campagne avec des candidats en partie inconnus, on a peu de chances de les connaître suffisamment pour les choisir en connaissance de cause.
De fait, il faudrait que les médias fassent leur travail d’information bien avant l’ouverture de la campagne électorale, pour poser aux candidats les questions qui les pousseront à se démasquer un tant soit peu ; il faudrait des débats contradictoires, portant sur toutes sortes de sujets… Mais plus que cela, le citoyen doit apprendre à interroger le passé et la vie des
candidats, car les choix de vie sont plus parlants que toute déclaration, même si tout le monde a le droit à l’erreur.
Cependant pour que tout cela puisse se faire, encore faudrait-il que les éventuels candidats disent en toute simplicité qu’ils le sont. Au contraire les citoyens doivent se contenter des supputations des journalistes. Pourquoi ?
En français poser candidature, signifie non seulement solliciter un poste, mais aussi et surtout prétendre avoir les qualifications pour prendre la responsabilité de ce poste.
Les citoyens togolais aimeraient bien vérifier les qualifications des candidats le plus tôt possible. Ne jouent-ils pas ainsi leur rôle de veille citoyenne ?
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