Contesté dans la rue depuis le 19 décembre, Omar Al-Bachir, 75 ans, qui fait l’objet d’un mandat de la Cour pénale internationale (CPI) sur la base de crimes de guerre commis au Darfour, a été contraint de quitter le pouvoir au profit d’une junte militaire.
Jeudi, les conditions de la conduite des affaires, dans le Soudan de l’après-Bachir, continuaient d’être discutées entre militaires, pour commencer, mais aussi avec les responsables de certaines milices et des services de renseignement, ou encore le colonel Hemeeti, chef de la Force de réaction rapide (RSF), des ex-janjaweeds qui ont été organisés par le NISS (services secrets), mais versés récemment dans l’armée. Une convergence parfaite pour, dans le flou de ces événements, faire de la RSF un acteur pivot.
Mais de quoi cela augure-t-il pour la suite ? Depuis plusieurs jours, les responsables de la contestation – au premier rang desquels figurent les membres de l’Association des professionnels du Soudan (SPA) – évoquaient les contours d’une solution destinée à débloquer la situation de confrontation latente au milieu de Khartoum, qui impliquait ce qu’une source appelait « un petit coup d’État ». Il faudra obtenir plus de précisions pour savoir si ce projet se déroule bien selon leurs vœux. Dans l’immédiat, ils ont appelé les foules à se masser en plus grand nombre encore devant le quartier général des Forces armées soudanaises (SAF) où avait lieu, jeudi matin, la réunion au sommet destinée à fixer les règles de l’après-Bachir.
Depuis qu’un mot d’ordre de la SPA, relayée par une structure plus large, la Déclaration pour la liberté et le changement, incluant notamment la coalition Nida Al-Sudan, dans laquelle figurent le parti Umma et plusieurs groupes armés (dont le JEM et le SPLA-Nord), avait appelé à une manifestation de masse, samedi 6 avril, la situation a commencé à basculer. Il y a encore quelques semaines, les manifestants étaient contraints à une forme d’intifada, pourchassés dans leurs quartiers par des agents de la sécurité (la plupart membres des forces spéciales du NISS, les services de renseignement, de milices diverses ou de la réserve de la police).
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Les discussions préalables des jours précédents en vue de sa composition incluaient aussi une forme de pacte : les militaires ne devaient se saisir du pouvoir qu’à la condition d’écarter les proches du président Al-Bachir et d’engager une purge de fond du système au pouvoir qui ne soit pas accompagnée de dérapages. Il s’agit de mettre en place une transition en douceur, afin d’éviter un bain de sang si les services de sécurité tentaient de briser le mouvement par la force, avec le risque – soupesé les jours derniers – de voir démarrer une forme de guerre civile si les forces s’affrontaient dans Khartoum. Ceci avec, de surcroît, l’obligation de céder le pouvoir, dès que possible, à une coalition de responsables civils dont la liste précise reste à apparaître au grand jour, dans la mesure où les têtes de la contestation sont, depuis près de quatre mois, soit dans la clandestinité, soit en prison.
La composition de la junte, lorsqu’elle sera finalisée, sera-t-elle de nature à répondre à ces exigences et à satisfaire le mouvement de contestation, qui souhaite un grand nettoyage à la tête de l’État afin d’en finir avec les pratiques de corruption qui ont contribué à précipiter le Soudan dans une crise économique grave ? Dans un premier temps, alors que des foules convergeaient vers le centre de Khartoum pour célébrer la chute d’Omar Al-Bachir, l’ambiance était au soulagement. « Je n’ai plus peur et je suis fier du Soudan aujourd’hui », confiait au téléphone Ali Seory, un professeur de l’université qui a pris une part importante dans l’organisation de la contestation.
Tesko Aristo Via Jean-Philippe Rémy (Johannesburg, correspondant régional)
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