• 27 juillet 2024 8h07

Miadé Bé Nou

Traditions, Cultures ancestrales et Actualités du Togo, d'Afrique et du Monde

Macky Sall ou la stratégie du pourrissement 

ByAristo

Fév 26, 2024

L’élection présidentielle censée se tenir au Sénégal a d’ores et déjà été reportée au 15 décembre 2024. Ainsi en a décidé Macky Sall, cela avec la bénédiction de l’Assemblée nationale qui a voté dans la nuit du lundi 5 février au mardi 6 février le projet de loi visant à repousser la présidentielle au 15 décembre.  

Le 7 février au Palais de la République, peut-on lire dans le communiqué ayant sanctionné le Conseil des ministres de ce jour, « le Président de la République est revenu sur le vote par l’Assemblée Nationale, de la proposition de loi fixant la nouvelle date du scrutin présidentiel au 15 décembre 2024 en réaffirmant sa décision de ne pas prendre part à l’élection ». 

La présidentielle prévue pour le 25 février prochain au Sénégal n’aura donc plus lieu. Entre débat houleux, évacuation manu militari des députés de la principale coalition d’opposition par les gendarmes, c’est peu dire que ce report a bien du mal à passer auprès des citoyens qui ont dû avoir la puce à l’oreille depuis les velléités de Macky de se présenter après ses deux mandats. 

Pour s’offrir cette prolongation tout sauf populaire, le successeur de Wade a des arguments qui ont de quoi faire sourire. « Le Chef de l’État a renouvelé sa confiance au Premier ministre Amadou Ba et à l’ensemble des ministres, et demandé au Gouvernement de prendre toutes les dispositions requises, pour l’organisation dans les meilleures conditions du scrutin présidentiel à la nouvelle date fixée. Le Président de la République a particulièrement réitéré sa détermination à poursuivre le dialogue avec tous les acteurs politiques et les forces vives de la Nation, en vue de renforcer, d’une part, notre démocratie à travers un processus électoral transparent, libre et inclusif et, d’autre part, la crédibilité de nos institutions », indique le communiqué relatif au Conseil des ministres.  Macky Sall est revenu à la charge lors d’un entretien accordé à AP le 9 février. « Je ne veux pas laisser derrière moi un pays qui plongera immédiatement dans de grandes difficultés », a-t-il indiqué dans un premier temps avant d’ajouter qu’il va « travailler pour l’apaisement, pour des conditions qui permettront au pays d’être paisible ». Discussions inclusives avant d’aller aux élections, prudence pendant les « les périodes de fragilité », les citoyens ont mangé du Sall jusqu’au trognon. Comme si les Sénégalais avaient besoin d’autant de mois pour participer à des élections pacifiques. Les agissements du Président sénégalais lui-même portaient en leur sein les germes du pourrissement du climat social. Comment lui faire comprendre qu’il a lui-même travaillé au climat où gisent ses concitoyens aujourd’hui ? Inutile de rappeler la pléthore de violences préélectorales, de récriminations à propos du fichier électoral qui sont autant d’ombres noires au tableau électoral sénégalais. Inutile de rappeler le rejet de la candidature par le conseil constitutionnel d’Ousmane Sonko le 5 janvier dernier, au motif que le dossier de candidature de l’un des poids lourds de l’opposition était incomplet. Inutile de faire mention de la mise à l’écart de Karim Wade, fils et ministre de l’ancien président Abdoulaye Wade et premier adjoint du secrétaire général du Parti démocratique sénégalais (PDS). Le Conseil constitutionnel ne saurait lui passer sa double nationalité qui a fait couler beaucoup d’encre. Ces événements qui ont chacun entrainé des mécontentements, ont contribué à la déliquescence d’un climat sociopolitique déjà crispé à souhait depuis le suspense maintenu par Macky Sall quant à sa participation ou non à la présidentielle. 

On est au moins sûr d’une chose, cette fois : le Sénégal replonge dans ce torrent d’incertitudes avec ce que cela entraîne mort d’hommes. Témoin les affrontements qui ont eu lieu ce 9 février lors de manifestations à Dakar et en province pour protester contre le report des élections. Avec déjà à la clé la mort d’un étudiant à Saint-Louis en marge d’un rassemblement. D’autres villes au Nord du Sénégal ont également connu des rassemblements certes dispersés à coups de gaz lacrymogène et de jets de projectiles. 

Le ciel sénégalais s’assombrit de nouveau. Bien malin qui dira ce que réservent les jours à venir aux populations qui ont du mal à comprendre les velléités de Macky à ce pays pourtant considéré comme l’un des modèles démocratiques africains. C’est déplorable qu’un Président qui a juré de respecter les règles démocratiques à son arrivée au pouvoir en soit arrivé à compliquer la vie à ses opposants. 

Source : Journal “Le Correcteur”, Sodoli KOUDOAGBO 

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